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La nécessaire interdiction des insecticides néonicotinoïdes
La situation des pollinisateurs est alarmante.
– Entre 1989 et 2013, la biomasse volante a chuté de 80% selon une étude allemande (l’étude porte sur l’Allemagne mais de nombreux experts s’accordent à dire que rien ne justifierait que la situation soit différente en France).
– Au moins 1 espèce d’abeille sauvage sur 10 est menacée d’extinction en Europe.
– 30% des ruches périssent chaque année en France ce qui fait de la France un des pays européens les plus fortement touchés. Avant 1995, les mortalités avoisinaient les 5%.
De multiples causes peuvent être à l’origine de ce déclin : maladies infectieuses (virus, champignons), acariens, espèces invasives (frelon asiatique), changements climatiques, manque de ressources florales et utilisation des pesticides.
Aucun de ces facteurs n’a pu être isolé comme l’unique responsable du déclin des populations d’abeilles et des pollinisateurs sauvages, mais la multiplication des études scientifiques sur les toxicités aigüe et chronique des néonicotinoïdes et les observations de terrain conduisent à constater que les néonicotinoïdes jouent un rôle clef dans la dégradation de l’état de santé des pollinisateurs. En 2015, un rapport d’expertise collective de l’Anses, affirmait : « La présence de nombreux agents infectieux (parasites dont Varroa en tout premier lieu, bactéries, champignons, virus) au sein des colonies, souvent asymptomatiques au départ, et leur exposition aux pesticides de diverses origines et mécanismes d’action (insecticides, fongicides et acaricides en particulier) entraînent selon toute vraisemblance le passage d’un état de santé normal à l’expression de pathologies conduisant à l’effondrement de la colonie. » Au regard de ces éléments, il est indéniable qu’interdire les néonicotinoïdes contribuera à l’amélioration de la santé des abeilles et des pollinisateurs sauvages.
La loi biodiversité adoptée par le parlement français en 2016 a interdit ces pesticides à compter du 1er septembre 2018. Néanmoins, des dérogations seront possibles, sur avis de l’Anses, entre 2018 et 2020.
En attendant l’entrée en vigueur de leur interdiction, les néonicotinoïdes sont utilisés sur a minima 6 millions d’ha, soit plus de 20% de la surface agricole utile française, sachant que ces chiffres ignorent les usages largement répandus en vigne et en arboriculture.
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Un renforcement indispensable de l’évaluation des pesticides
A la suite de nombreuses publications scientifiques et de demandes de la part des apiculteurs et des parlementaires européens, la Commission européenne a saisi l’EFSA (Autorité Européenne de Sécurité Alimentaire) en décembre 2010, afin qu’elle reconsidère l’évaluation des risques des pesticides systémiques pour les abeilles.
En 2012, l’EFSA a publié un avis scientifique, d’une importance majeure, sur la manière dont les pesticides devraient être évalués quant à leur impact sur les abeilles. Cette analyse approfondie admet que les pesticides systémiques, accusés des mortalités accrus d’abeilles à une grande échelle, n’ont jamais été correctement évalués et en conséquence, n’ont jamais été correctement autorisés.
L’EFSA a publié en 2013 son propre document d’orientation pour une évaluation adéquate de l’impact des pesticides sur les abeilles tenant compte de toutes les voies d’exposition des abeilles, des effets sublétaux et des effets sur la colonie. Plusieurs années après, les Etats membres, au nombre desquels la France, refusent toujours d’adopter ce document d’orientation, au détriment des pollinisateurs, des apiculteurs et des citoyens qui veulent une meilleure protection des abeilles.
crédits photos : JM Bonmatin et F. Hadjina